Véronique Bénéï
Chan Langaret
Enric Porqueres I Gené
Jeudi 16 Janvier 2014
de 15h00 à 17h00
salle 587, 190 avenue de France, 75013 PARIS
Jean-Claude Monod (CNRS/ENS) présentera et discutera de son livre :
Qu’est-ce qu’un chef en démocratie ? (Seuil, "l’ordre philosophique", 2012)
Séance organisée et animée par Irène Bellier
La mystique du chef a participé des pires constructions idéologiques du XXe siècle, et la démocratie reste aujourd’hui la forme de pouvoir qui doit s’approcher autant que possible d’un gouvernement du peuple par lui-même. Elle semble pourtant, dans les faits, indissociable de modes de délégation et de représentation, et surtout d’une certaine incarnation temporaire de l’autorité et d’un pôle de décision personnelle. Mieux, la tendance contemporaine à la dépossession des peuples de la capacité de décider de leur sort, au profit d’un pouvoir toujours accru des puissances économiques, donne une actualité nouvelle aux inquiétudes de Max Weber sur l’avènement d’une « démocratie acéphale », peu apte à faire valoir les intérêts des dominés. Mais dans les conditions médiatiques de sélection des leaders politiques que nous connaissons, peut-on penser qu’un renforcement de la démocratie et une défense de la part la plus fragile du peuple passent par l’apparition de personnalités charismatiques, capables de rompre avec les logiques impersonnelles de la bureaucratie et des marchés ?
Le livre de JC Monod entreprend ainsi d’éclairer la figure problématique - mais peut-être nécessaire - d’un chef en démocratie et tente de définir ce que serait un « charisme démocratique ». À rebours des confusions qui veulent faire du dirigeant démocratique un Père, un Maître ou un Savant, il se risque à imaginer une forme originale de « charisme progressiste », que seule la démocratie serait à même de promouvoir.
Pour cette séance du séminaire LAIOS, J.-C. Monod reviendra sur certains emprunts que le livre fait à l’anthropologie et à l’ethnologie, notamment autour de la question du caractère projectif ou non de la quête d’un "chef" dans les "sociétés sans Etat" et des ressources politiques que l’on a pu ou pourrait tirer, en Occident, de l’exemple de sociétés apparemment sans chef coercitif. Il évoquera aussi certaines interrogations, non consignées dans le livre, sur la place des leaders dans les mouvements dits "indigénistes" ou des "peuples autochtones", et sur les transformations de la vision de "l’avant-garde éclairée" dans une certaine culture de gauche, plutôt marxiste, aujourd’hui en crise ou en cours de redéfinition.
Prochaine séance le jeudi 20 février 2014 : Sandra Brunnegger (Cambridge),
The Craft of Justice-Making in Colombia : The Permanent Peoples’ Tribunal in Colombia. Séance organisée et animée par Véronique Bénéï