Responsables
Catherine CHORON-BAIX
Patrick WILLIAMS
Participants
Sylvaine CAMELIN
Jean-Charles DEPAULE
Francine FOURMAUX
Marie TREPS
Les mouvements de populations qu’étudie Sylvaine Camelin (Paris X- LESC, chercheure associée au LAU) dans l’océan Indien fournissent un exemple éclairant de ces questions. Afin de rendre compte de l’épaisseur temporelle de ces migrations essentiellement urbaines, Sylvaine Camelin s’intéresse aux histoires familiales et retrace les parcours de familles qui, de génération en génération, investissent de nouveaux espaces. Pour ce faire, elle explore les souvenirs et la mémoire individuelle de migrants (hommes et femmes de tous âges), leurs pratiques (matrimoniales, sociales…), les transmissions (culinaires…), les circulations (d’objets, de photographies…), les projections et les planifications (scolaires, professionnelles et financières…).
Patrick Williams observe quant à lui les relations entre différents groupes dits « tsiganes » à Paris et dans la banlieue parisienne. Certains lieux – des marchés, des hôpitaux, des commerces, des cafés… - constituent aujourd’hui de véritables laboratoires pour l’observation ethnographique. S’y côtoient, s’y rencontrent ou s’y croisent en effet des « Tsiganes » venus de multiples horizons, ayant connu des parcours historiques différents dans le dernier quart de siècle, et étant porteurs de panoplies culturelles contrastées. Observer de quelle façon et à quelles occasions se nouent (ou pas) des relations entre ces différents « Tsiganes » amène à réfléchir à certaines questions qui intéressent directement l’anthropologie : l’importance relative des facteurs culturels et des facteurs historiques, le poids des politiques étatiques sur les stratégies et les attitudes des membres de groupes minoritaires, la pertinence de notions comme celles d’ « insertion », d’ « intégration », d’ « adaptation », la définition d’une notion comme celle d’ « ethnicité », etc. Cette observation nourrit également la réflexion entreprise par Patrick Williams sur la possibilité d’une approche ethnologique de la totalité tsigane et non plus seulement de telle ou telle communauté spécifique.
Sur un terrain proche, Marie Treps s’intéresse à la représentation des Bohémiens et des Tsiganes dans la société sédentaire au sein de l’espace européen, confrontant deux points de vue : le linguistique (comment ils sont nommés) et le sémiologique (comment ils sont représentés dans la littérature et dans l’art). Sa réflexion sur emprunt linguistique et emprunt culturel se poursuit dans la même perspective que celle adoptée pour étudier les emprunts du français aux autres langues. Marie Treps porte à présent son attention aux termes français qui se sont implantés dans les langues d’Europe (publication prévue pour 2009).
L’ouverture des sociétés d’Asie du Sud-est à l’économie mondiale est un autre pôle d’observation de ces échanges et de leurs conséquences sur les cultures en présence. Continuant de partager ses recherches entre la France et le Laos, Catherine Choron-Baix se consacre aux pratiques et productions artistiques qui s’exportent d’un pays à l’autre et au-delà. Elle examine notamment les incidences du retour de membres de la diaspora – les returnees - sur les réalisations du Laos d’aujourd’hui, ainsi que les conditions d’accès de ses artistes au marché de l’art international. Elle poursuit dans ce but l’enquête, commencée en 2005, sur un programme éducatif de coopération artistique entre la ville de Luang Prabang, RDPL, et des artistes de renommée internationale en résidence dans l’ancienne capitale royale. Observant la nature des collaborations entre la société locale et ces intervenants extérieurs, elle veut aussi, au travers de cette expérience d’art in situ, interroger les glissements disciplinaires qui s’opèrent aujourd’hui entre anthropologues et praticiens des mondes de l’art et leurs capacités à rendre compte des réalités contemporaines.
La poésie arabe a connu dans la deuxième moitié du XXe siècle deux mises en cause successives de l’héritage classique, à la fois thématiques et formelles - adoption du vers libre, puis du « poème prosé ». Ce renouvellement doit assurément beaucoup à un mouvement amplifié de traduction depuis des langues étrangères. Centrées jusqu’ici sur les poètes et la poésie en réseaux à l’intérieur du vaste monde arabe (où l’on observe une tendance à un désenclavement, via Internet, du Maghreb par rapport au Machrek, qui traditionnellement est dominant dans le champ littéraire arabe), les recherches de Jean-Charles Depaule se développeront désormais dans deux directions. Il s’agit, d’une part, d’essayer de mesurer l’impact des nouvelles technologies, non seulement sur les circulations, les échanges, voire les emprunts, mais sur la pratique de l’écriture elle-même. Il s’agit, d’autre part, de mieux saisir les rapports entre la poésie et d’autres formes, techniques artistiques et instruments contemporains (performance, vidéo, blog…).
La recherche de Francine Fourmaux serre de plus près encore la question des transformations dans le champ artistique. Le monde du cirque, qu’elle étudie depuis plusieurs années, est caractérisé par la mobilité et l’association de différentes disciplines, et marqué depuis quelques décennies par des transformations profondes : sédentarisation, emprunts à d’autres arts (théâtre, danse), développement de la pratique amateur. C’est à poursuivre l’étude de leurs enjeux et de leurs significations que Francine Fourmaux souhaite se consacrer. Elle envisage pour cela de développer l’enquête à partir des usages du corps dans différents lieux de création et de diffusion en France et en Europe, et au sein de plusieurs compagnies.
Atelier "Visions de l’art" (resp : Catherine Choron-Baix)
Participants : Jean-Charles Depaule, Francine Fourmaux, Christine Jungen, Christian Lallier, Claire Le Thomas, Virginie Milliot, Olivia Kindl, Marie Percot, Stéphane Rennesson, Victor Stoichita, Annabel Vallard, Patrick Williams.
Cet atelier regroupe des chercheurs travaillant sur différents arts et artisanats d’art à travers le monde (Afrique, Amérique du Nord et centrale, Asie, Europe et Moyen Orient) et conduit une réflexion collective rattachée au champ de l’anthropologie de l’art, avec un accent particulier mis sur les arts relevant du label « contemporain » et « urbain ». Il se donne pour objectif d’analyser l’acte créateur dans ses formes canoniques autant que ses transformations récentes, et d’étudier en parallèle l’impact des œuvres sur le spectateur.
Parmi les thématiques traitées, celle de la « vision » est retenue pour les mois à venir. Elle s’entend dans deux acceptions différentes et complémentaires. L’une renvoie aux intentionnalités des créateurs (la « vision » de l’artiste, de l’artisan, du technicien etc.), et inclut les aspects intellectuels, techniques, esthétiques et affectifs, du procès de création. L’autre se situe du côté des publics, la réflexion portant alors sur la réception des œuvres, dans ses dimensions individuelles et sociales, biologiques, cognitives, sensibles et émotionnelles.
Les séances de travail de l’atelier alternent entre le partage de lectures, une troisième « vision de l’art » finalement - celle des ethnologues, sociologues, philosophes, historiens de l’art dont sont discutés les ouvrages - et la présentation de matériaux ethnographiques et d’expériences de terrain. Des rencontres avec des professionnels des mondes de l’art (artistes, commanditaires, techniciens…) sont aussi programmées, dans le cadre de demi-journées d’étude.