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19 mars 2015, 15h-19h : Séminaire FRONTIÈRES ET MOUVEMENTS DE LA VILLE

publié le

I I A C

institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain
Laboratoire d’anthropologie urbaine

FRONTIÈRES ET MOUVEMENTS DE LA VILLE.
Écritures, descriptions et transformations

Michel Agier (EHESS), Alessia De Biase (École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette), Franck Mermier (CNRS) et Anne Raulin (Université Paris Ouest Nanterre)

EHESS, Amphithéâtre F.Furet au 105 bd Raspail 75006 Paris, 15h-19h

19 mars 2015, EHESS

DANGER, VIOLENCE ET PEUR EN VILLE

Sans peur et sans reproche ? Journalisme de quartier et débats publics à Lyari, Karachi

Laurent Gayer, chercheur au CNRS/CERI-Sciences Po, Paris

Parfois surnommé dans les médias anglophones pakistanais la « Colombie de Karachi », le quartier de Lyari a mauvaise réputation. Théâtre d’une guerre des gangs interminable, attisée par les partis politiques qui se disputent le contrôle de cette inner-city en déshérence, Lyari est pourtant irréductible à ces stéréotypes. Plus ancien quartier ouvrier de la ville, c’est aussi – et ce depuis le 19e siècle – l’un des plus politisés. En première ligne des mouvements nationalistes de la période coloniale, puis des luttes ouvrières et du mouvement pour la restauration de la démocratie dans la période postcoloniale, Lyari se singularise par une culture politique contestataire et cosmopolite, tranchant nettement avec les dérives autoritaires et xénophobes qui, ailleurs, ont façonné les luttes pour la ville. Mais Lyari est aussi un quartier hanté par la peur – peur des gangs, des forces de sécurité ou de partis politiques aux méthodes expéditives, mais aussi peur du chômage ou du déclassement. Cet état de peur(s) chronique(s), à la fois matérielles et existentielles, est attisé par un journalisme de quartier d’un type bien particulier. Cette contribution, présentant les résultats préliminaires d’une enquête en cours – menée en collaboration avec une collègue sociologue pakistanaise –, s’attardera sur les méthodes de travail, le contenu et la réception du plus populaire de ces journaux locaux. Jânbâz (lit. « celui qui met sa vie en jeu », i.e. le téméraire) suscite un engouement sans équivalent dans le reste de Karachi, parfois décrit comme une « addiction » par certains lecteurs du journal. Pour autant, ce quotidien spécialisé dans le crime et la politique locale ne fait pas l’objet d’une lecture passive. Au contraire, ses lecteurs déploient un esprit sévèrement critique, dans une épreuve de vérité où se joue leurs représentations du quartier, de la morale journalistique et politique ou encore du plausible et de l’improbable. Jânbâz ne se laisse d’ailleurs pas ramener à une feuille de chou à scandale : c’est aussi une arène publique où se jouent les réputations et se mesurent les grandeurs, et où forces de l’ordre et figures de la pègre locale s’affrontent dans un jeu de miroir qui tend à brouiller les frontières entre ces mondes sociaux et ces lieux de pouvoir a priori antagoniques.

L’ethnographie à l’épreuve de la guerre à Alep

Thierry Boissière, maître de conférence en anthropologie, université Lyon 2/GREMMO

Entrée plus tardivement dans la guerre (aout 2012) que les autres grandes villes syriennes, Alep, désormais au trois quart vidée de sa population, s’enfonce chaque jour davantage dans un conflit de positions particulièrement meurtrier et destructeur. C’est dans ce contexte rendant impossible ou en tous les cas très risquée toute enquête ou étude de terrain que je souhaite développer une réflexion sur la façon dont il est malgré tout possible de produire une analyse des évènements et de la ville. Je présenterai les éléments et les limites d’une "ethnographie différée et à distance » : on verra notamment comment il est possible de mobiliser, jusqu’à un certain point, un savoir, constitué antérieurement, dans le cadre d’une "géographie sociale" du conflit.
Nous verrons dans un deuxième temps que la description ainsi que certaines formes ordinaires de représentation de la ville (photographies, tableaux, dessins), participent aussi de la production d’une connaissance globale ou parcellisée de celle-ci, tout en permettant peut-être à la ville détruite de perdurer malgré tout comme "cadre mémoriel vécu."

Subjectivités et objectivations du danger dans les villes du Moyen-Orient : quelques éléments de réflexion à partir de Naplouse (Territoires palestiniens occupés)

Véronique Bontemps, chercheur au CNRS/IIAC-LAU

Kaboul, Beyrouth, Bagdad, Alep… Bon nombre de villes du Moyen-Orient apparaissent aujourd’hui naturellement associées à l’idée de danger, image relayée par les médias et les écrans de télévision : « zones rouges » pour les touristes ou les organisations scientifiques et humanitaires, espaces livrés aux risques d’attentats ou à la barbarie d’organisations terroristes… Le danger représente en effet, pour les habitants de ces villes, une réalité avec laquelle ils doivent composer dans leur vie quotidienne. Cette communication a pour objectif de mettre en place un questionnement sur le danger (ses perceptions subjectives, les processus de familiarisation que celles-ci déterminent) comme analyseur de la ville, voire producteur d’urbanité au Moyen-Orient, à partir de l’exemple de Naplouse en Cisjordanie.