Mardi de 10 h à 17 h (amphithéâtre François-Furet, 105 bd Raspail 75006 Paris), les 23 octobre, 6 et 20 novembre et 11 décembre 2012.
Thématique du séminaire
À la suite des années précédentes, nous proposons un séminaire de master et de recherche sous forme de 4 journées consacrées à l’analyse de films faits par, avec et sur des Aborigènes, des Amérindiens, des Polynésiens ou d’autres peuples qui ont participé à l’élaboration de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones (ONU, 2007). La dernière décennie a vu une accélération de films sur les situations et luttes autochtones, à caractère ethnographique, documentaire ou fictionnel, dans lesquels des peuples spoliés se dressent comme protagonistes de leur propre histoire. Depuis la création de YouTube et d’autres plateformes de partage, la population civile met en ligne de plus en plus d’images, à la fois messages politiques et divertissement : la Toile offre ainsi un nouvel outil d’appel à des soutiens, des campagnes de mobilisation contre les abus et de visibilité mondiale pour la mise en valeur des cultures et langues autochtones.
Les productions filmiques s’inscrivent dans une réappropriation de leur histoire par les peuples concernés qui explorent la colonisation et les problèmes contemporains tout en mettant en valeur leurs visions critiques, leurs savoirs, leurs patrimoines, leurs spiritualités et diverses formes de créativité. Face à cette prise de parole et de mise en scène, l’anthropologie est mise au défi et agitée de divers débats que nous évoquerons à l’occasion de chaque séance.
Séance du 23 octobre 2012 : Les Premiers Australiens, Aborigènes et insulaires des iles Torres.
10 h -13 h : Seront présentés des extraits de la série télévisée pionnière First Australians (2008), de la réalisatrice aborigène Rachel Perkins, qui met en contexte des archives coloniales commentées par des personnalités du monde académique, notamment autochtones, pour raconter une différente histoire de l’Australie :
Site web de la série : http://www.sbs.com.au/firstaustralians/
Voir aussi la traduction française du livre accompagnant la série : Aborigènes. Une histoire illustrée des premiers habitants de l’Australie. Textes rassemblés par Marcia Langton et Rachel perkins. Tahiti : Au Vent des îles, 2012.
14 h -17 h : Sur les traces de la fourmi à miel, film documentaire de Valérie Mégard, 2007 / 47’ / Beta Num, coproduction alter ego films et Agat films & Cie avec l’aide du Centre de l’Audiovisuel et du Cinéma du Ministère de la Communauté française de Belgique, Planète câble, Cityzen TV, TV5 Monde, CNC.
« Là d’où je viens, en France, j’ai vu une peinture : le Rêve de la Fourmi à Miel. Dans ce Rêve il y a des points, des croissants, des lignes... Il n’y a pas de sens pour les regarder. Je suis bouleversée mais je ne sais pas pourquoi. Ces signes sont comme des traces à suivre. Elles m’entraînent dans un désert rouge, le désert australien. À Papunya je vis avec les Aborigènes du désert. Je leur demande l’histoire de la Fourmi à Miel. Ils me racontent Tjukurrpa, le Rêve. »
Voir au musée du quai Branly l’exposition historique avec 167 œuvres des premiers peintres de Papunya (1971-1972) :
http://www.quaibranly.fr/fr/programmation/expositions/a-l-affiche/aux-sources-de-la-peinture-aborigene.html et la programmation de films documentaires et de fiction : http://www.quaibranly.fr/es/programmation/cine/aborigenes-daustralie.html
Séance du 6 novembre 2012 : L’Amazonie, enjeux de changements socio-économiques et climatiques. Luttes territoriales et recours aux nouvelles technologies
10 h -13 h : À partir de la projection du film Children of the Amazon (72’) par la réalisatrice Denise Zmekhol, nous aborderons les questions du changement socio-économique en Amazonie, en relation avec l’exploitation non durable des ressources de la forêt. Le film est l’occasion d’introduire le peuple Surui, de l’état de Rondonia au Brésil, et deux figures de la défense de l’Amazonie , Chico Mendes qui fut assassiné en 1988, et Almir Surui pour qui la défense de la forêt passe aujourd’hui par un partenariat technologique avec Google. Nous évoquerons dans cette matinée la construction de la relation entre droits humains et protection de la diversité, culturelle et biologique.
14 h -17 h : À partir du film La amazonia en venta : el pueblo awajun y la lucha por preservar su territoria ancestral (35’) réalisé par IWGIA avec Ore-Media, Irène Bellier reviendra sur les problèmes posés par les concessions gouvernementales de territoire aux entreprises minières. Le film court sera l’occasion d’aborder les questions relatives à la place du droit dans les luttes pour la protection de la forêt comme espace de vie, aux échelles locales, nationales et internationales, et de discuter du conflit entre les visions du Buen Vivir et le développement par la croissance.
À partir du film, Sisa Ñampi – Frontière de vie, (25’), du réalisateur Eriberto Gualinga, du peuple Kichwa-Sarayacu, nous découvrirons le projet de vie de tout un peuple qui, après avoir lutté contre l’industrie pétrolière, et déposé plainte en 2003 devant la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme, a vu ses droits reconnus. En juillet 2012, l’Équateur a été condamné à indemniser le peuple Sarayacu pour ne pas avoir consulté ses membres, et pour les dommages causés par l’activité pétrolière. Parallèlement à ces luttes, en 2006, les Sarayacu s’engageaient dans la réalisation d’une immense frontière végétale de plus de 300 km de long, formée de cercles d’arbres à fleurs, un projet de partage des connaissances avec les prochaines générations qui les verront fleurir, et d’engagement pour la protection de la diversité du Vivant…Voir : www.frontieredevie.org.
Séance du 20 novembre 2012 : Polynésie française, politique, langues et culture
10 h -13 h : La projection d’un documentaire tahitien permettra de présenter l’histoire et les enjeux contemporains des Tahitiens et d’autres insulaires de la Polynésie française.
L’élu du peuple – Pouvanaa, Te Metua (53’) de Marie-Hélène Villierme, réalisatrice et productrice de TUATAU PRODUCTION (Prix du Fifo 2012).
« C’est à la fin des années 40 qu’apparaît dans les Établissements français d’Océanie (la Polynésie française aujourd’hui) une vie politique locale. Pouvanaa a Oopa, premier Tahitien élu député en 1949, est aussi le leader charismatique du premier parti politique, le RDPT (Rassemblement des Populations Tahitiennes). Il s’oppose avec force à l’administration coloniale française à en devenir très gênant lorsque le choix d’implanter un centre d’expérimentations nucléaires dans le Pacifique est pris. Au nom de la raison d’État, une stratégie se met en place pour isoler l’homme par qui le plan national pourrait échouer. Victime d’une machination, en octobre 1958, il est arrêté, emprisonné et condamné à 15 ans d’exil. La destinée de Pouvanaa a Oopa est fortement liée à l’histoire de son pays. Les dates de vie et de mort (1895-1977) de celui que le peuple appelle le Metua (« le père ») s’insèrent entre deux faits hautement symboliques : l’année de sa naissance marque la signature du traité d’annexion de son île natale par la France. L’année de sa disparition coïncide avec celle de la mise en place du premier statut d’autonomie de gestion du Territoire de la Polynésie française.
Mis en images pour la première fois à partir d’archives et de témoignages importants, le destin politique de Pouvanaa a Oopa, l’orchestration de sa mise à l’écart, nous sert de fil rouge pour traverser une page peu connue et pourtant décisive de l’Histoire polynésienne récente. »
14 h -17 h : Marie Salaün exposera une initiative en Polynésie française, le ’ōrero, art déclamatoire traditionnel désormais enseigné dans les écoles primaires de tous les archipels.
Mis en spectacle lors d’une rencontre annuelle entre les lauréats des différents districts, ce projet né en 2007, a une double vocation : pédagogique et culturelle. À travers une présentation de quelques performances d’enfants et un documentaire de la Cellule langues et culture polynésiennes de la Direction de l’enseignement primaire (15 minutes) destiné aux enseignants dans les écoles, nous nous interrogerons sur le rôle d’une institution comme l’école à la préservation/revitalisation des langues et cultures autochtones. Que fait-on à l’école quand on lui demande de promouvoir la culture ? Que fait-on à la culture quand on la coule dans la forme scolaire ?
Séance du 11 décembre 2012 : Cinéma communautaire et Travaux d’étudiant.e.s
10 h -13 h : Cinéma communautaire : Australie et Mexique
Jessica De Largy Healy présentera une sélection de films réalisés par des Aborigènes Yolngu de la Terre d’Arnhem dans un nouveau centre autochtone de production de média, the Mulka Project, et diffusés sur Internet : http://www.youtube.com/user/TheMulkaProject
Coralie LeClec’h (IHEAL) présentera son travail de M2 « de la censure à l’oubli - l’expérience pionnière de cinéma communautaire au Mexique », avec des extraits des films censurés par l’INI, puis restaurés par l’agence qui l’a remplacé en 2003, la Comisión Nacional de Desarollo para los Pueblos Indígenas (CDI)
14 h -17 h : Travaux d’étudiants et synthèse du séminaire
Thomas Alexandre (M1) présentera un exposé : "Une approche de la culture kali’na en Guyane française. L’art des potières" et son film "Maria - Potière kali’na". Images tournées en 2009. Réalisation en 2010. Durée : 25 minutes. Il est visible à cette adresse : http://vimeo.com/43772348
L’Esprit de l’Ancre, documentaire de B. Glowczewski et Wayne Jowandi Barker, cinéaste aborigène, tourné avec les Yonlgu de Bawaka, Australie, 2002 (sous-titré français). Visible en anglais : http://videotheque.cnrs.fr/index.php?urlaction=doc&id_doc=980&langue=EN
Discussion de synthèse générale.
Pour information, la sortie récente de ce livre auquel les quatre coordinatrices du séminaire ont contribué :
Le Statut des peuples autochtones. A la croisée des savoirs. Stéphane Pessina Dassonville (ed), Coll. Cahiers d’Anthropologie du droit, Paris 1, Karthala, 2012.
Validation du séminaire
note = 60% participation, 40% travail à présenter oralement à la dernière séance avec une sélection d’images (fixes ou animées) : (10’ pour les M1) (20’ pour les M2) en nous remettant une trace écrite (texte court, powerpoint, etc) de l’exposé.
Lectures recommandées :
Bellier, Irène, 2007, « Les deux faces de la mondialisation : l’ONU et les peuples autochtones », in La mesure de la mondialisation, Cahier du Gemdev, 31, p. 80-96.
Bellier, Irène, 2008, « Le Développement et les Peuples Autochtones ; conflits de savoirs et enjeux de nouvelles pratiques politiques », in Geronimi V., Bellier I., Gabas J.-J., Vernières M., Viltard Y., Savoirs et politiques de développement. Questions en débat à l’aube du XXIe siècle, Paris, Karthala, p. 119-139.
Bellier, Irène, 2011, « Misunderstanding of Autochtony vis-à-vis the question of Indigenous peoples », Social Anthropology, 19 (2) : Special issue « The uses and Misuses of ‘Indigeneity’ and ‘Autochtony », p.204-206
Bellier, Irène, 2012, « Les peuples autochtones aux Nations Unies : la construction d’un sujet de droits/acteur collectif et la fabrique de normes internationales », Critique internationale, 54, p. 61-80
De Largy Healy, Jessica, 2011, « Pour une anthropologie de la restitution. Archives culturelles et transmissions des savoirs en Australie », Cahiers d’Ethnomusicologie, numéro spécial “Questions d’éthique”, v. 24, p.43-63.
Gagné, N., Martin, T. & Salaün, M. (eds), 2009, Autochtonies. Vues de France et du Québec, Québec, Presses de l’Université Laval.
Gagné N. & Salaün M. (eds) 2012, Dossier « Indigeneity in Oceania Today : A Conceptual Tool, a Battle Cry and an Experience », Social Identities Journal for the Study of Race, Nation and Culture - volume 18, issue 4 : http://www.tandfonline.com/toc/csid20/18/4
Glowczewski, Barbara, 2004, Rêves en colère. Avec les Aborigènes, Plon/Terre Humaine.
Glowczewski, B. & De Largy Healy J. (avec les artistes et Galiwin’ku et Lajamanu), 2005, Pistes de rêves. Voyage en terre aborigène, Éditions du Chêne.
Glowczewski B. & Henry R. (eds), 2011, The Challenge of Indigenous peoples. Spectacle or politics ?, Oxford, Bardwell Press, (traduction mise à jour de Le défi indigène. Entre spectacle et politique, 2007, avec exemples d’Australie, festivals du Pacifique, Sibérie et Inde).
Un grand nombre de ces références bibliographiques sont consultables à la bibliothèque Lévi-Strauss du Laboratoire d’anthropologie sociale (EHESS/CNRS/Collège de France),
Collège de France, 52 rue du Cardinal-Lemoine 75005 Paris
Sites recommandés :
SOGIP - Programme de recherche : "Echelles de gouvernance - les Nations unies, les Etats et les Peuples Autochtones ; l’autodétermination au temps de la globalisation"
Survival. Pour les peuples indigènes
Série The first Australians
Mots-clés : Anthropologie, Cinéma, Culture, Droit, normes et société, Environnement, État et politiques publiques, Éthique, Humanités numériques, Image, Savoirs, Visuel,
Aires culturelles : Contemporain (anthropologie du, monde),
Intitulés généraux :
Centre : LAS - Laboratoire d’anthropologie sociale
Direction de travaux d’étudiants : sur rendez-vous par courriel à : b.glowczewski(at)college-de-france.fr, ibellier(at)club-internet.fr, marie.salaun(at)ehess.fr.
Réception : Barbara Glowczewski, Laboratoire d’anthropologie sociale, Collège de France, 52 rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris, tél. : 01 44 27 17 57, télécopie : 01 44 27 17 66.
Site web : http://las.ehess.fr/document.php?id=143
Adresse(s) électronique(s) de contact : b.glowczewski(at)college-de-france.fr