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Plozévet mène l’enquête en sciences humaines et sociales. Par Bernard Paillard

publié le

Dans les années soixante, Plozévet, petite commune du Sud Finistère, avait été l’objet d’une vaste recherche interdisciplinaire en sciences humaines et sociales. En mai 2008, un colloque sur l’histoire et l’actualité des enquêtes sur Plozévet s’était conclu par la nécessité de retrouver les archives de ces travaux et de les valoriser.

L’histoire

Au début des années soixante, la délégation à la recherche scientifique et technique (DGRST) mettait en place une nouvelle gouvernance de la recherche. Après définition de programmes pluridisciplinaires et pluriannuels au plan national, elle incitait des recherches selon un nouveau mode de financement, concentrant des crédits sur un nombre restreint de grands projets. Ces Actions concertées permettaient la collaboration de chercheurs appartenant à des disciplines différentes et émanant de plusieurs institutions.

En ce qui concerne les Sciences humaines et sociales, la première et la plus importante du genre intéressa une petite commune bretonne du Sud Finistère : Plozévet. Cette enquête pluridisciplinaire s’était donnée deux grands buts :
. concentrer sur un seul objet un nombre conséquent de chercheurs venus d’horizons différents, en vue de les familiariser à l’interdisciplinarité ;
. engager des études sur le monde rural et agricole alors en pleines transformations.

Aussi, de 1961 à 1965, une centaine de chercheurs prirent le chemin de Plozévet : anthropologues physiques et médecins, ethnologues, géographes et historiens, sociologues et démographes, psychosociologues et sémiologues. Ces études donnèrent lieu à la publication de cinq livres (parmi lesquels celui d’Edgar Morin, Commune en France, la métamorphose de Plozévet, Fayard, 1967), d’une quarantaine de rapports et de divers articles et à l’écriture de plusieurs journaux de chercheurs et de carnets d’enquête.

Ces données textuelles furent doublées par la réalisation de cinq films ethnographiques, par la prise de clichés anthropométriques, de portraits, de scènes et de paysages, et par l’enregistrement de plus de 300 heures d’entretiens. De plus, un grand nombre d’objets muséographiques furent recueillis durant les enquêtes et conservés au Musée des Arts et traditions populaires (actuellement au MUCEM).

Ces divers documents, jamais centralisés, sont pratiquement inaccessibles. Les textes sont dispersés dans différents lieux : au Centre de recherche bretonne et celtique (Brest), au Centre Edgar Morin (Paris), aux Archives nationales et diverses administrations, chez les chercheurs. Les films sont en dépôt au Musée de Bretagne (Rennes) et n’y sont que très difficilement consultables. Les photos du fonds le plus important sont quant à elles conservées aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône. Les sources sonores sont en dépôt, les unes au Musée de Bretagne, les autres chez un chercheur.

Si un travail de recensement a permis de localiser cet ensemble, il a aussi mis les doigts sur les difficultés à surmonter pour quiconque voudrait le consulter. Il est pourtant évident que ces documents sont importants à plus d’un titre.

En premier lieu, ils constituent un rare témoignage de ce qu’était la société rurale bretonne, et plus généralement française, dans les années soixante, à une période de profonds bouleversements techniques, économiques, sociaux et culturels. Il s’agit aussi de documents pouvant donner lieu à des comparaisons tant géographiques que diachroniques et même à de nouvelles interprétations, certaines données brutes n’ayant pas été exploitées ou pouvant être soumises à des interrogations plus contemporaines. De plus, avec le temps, ces dossiers ont acquis une valeur patrimoniale, scientifique et culturelle.

Deuxièmement, l’action concertée de Plozévet est emblématique de la façon dont on concevait les recherches en sciences sociales et humaines à l’époque. Ample étude de terrain, elle illustre les différentes façons de le concevoir et de s’y comporter. Ces archives sont donc des matériaux incontournables pour l’histoire des Sciences humaines et sociales en France, à une époque où celles-ci se développaient sur le plan institutionnel et défrichaient de nouveaux domaines (cas de la question rurale), mais aussi à un moment où cette expansion allait de pair avec une fragmentation-spécialisation disciplinaire, malgré les appels réitérés à l’inter ou à la pluridisciplinarité.

Troisièmement, ce fonds documentaire est composé de sources textuelles, photographiques, sonores et audiovisuelles interconnectées, leurs productions étant redevables d’une unité de lieu et de temps — la société plozévétienne des années soixante dans son enracinement historique et culturel —, mais aussi parfois, d’une unicité institutionnelle, une recherche pouvant produire plusieurs types de documents. Cette diversité constitue le défi majeur de ce retour sur archives : comment rendre interopérables des données sous différents formats ?

Les projets

Ce retour sur les enquêtes de Plozévet et leurs archives a donné lieu à deux types de projets, Plozcorpus et Plozarch. Ces projets sont portés par le Centre de recherches historiques de l’Ouest de l’Université de Rennes 2 (UMR CNRS 6258) et dirigés par Bernard Paillard, directeur de recherche émérite au CNRS.

Plozcorpus est voué à la constitution du corpus virtuel des archives des enquêtes. Il est soutenu, par la Maison des Sciences de l’Homme de Bretagne (MSHB) et le TGE Adonis, et se développe avec la collaboration du Centre National pour la Numérisation de Sources Visuelles du CNRS (Centre A. Koyré/CRHST UMR CNRS 8560). Un site Internet permettra d’accéder à la base de données et de connaître les différents lieux de dépôt et les conditions de consultation.

Plozarch est une recherche-action qui entend valoriser, au niveau local, ce travail archivistique par la réalisation avec les Plozévétiens de plusieurs types de documents (textuels, sonores, audiovisuels, multimédias). Il est soutenu par le Conseil régional de Bretagne et la Commune de Plozévet.

Ces projets seront exposés à Plozévet le 6 mars 2010 (14h-18h, Salle Avel-Dro) lors d’une manifestation où sera présenté et développé le travail précurseur et exemplaire fait à partir des archives de la première mission sur le folklore musical de 1939 menée en Basse-Bretagne par le Musée des arts et traditions populaires.

Les collaborateurs

Bernard Paillard, directeur de recherche émérite au CNRS (CERHIO), membre associé au
Centre Edgar Morin
Aurélie Hess-Miglioretti, ingénieure d’études CNRS (CERHIO)
Eugénie Ollivier, documentaliste audiovisuelle (CERHIO, sous contrat)
Laure Welschen, chargée de politiques culturelles et patrimoniales (CERHIO, sous contrat)
Catherine Godest, ingénieure d’études CNRS (MSHB, chargée de communication)
Stéphane Pouyllau, ingénieur d’études CNRS (TGE Adonis, CNRS, responsable du pôle "humanités numériques")
Delphine Usal, technicienne CNRS (Centre Alexandre Koyré, CN2SV, Chargée des plateformes web).

Contact : Bernard Paillard E-mail

En savoir plus sur le projet PLOZARCH
sur le projet PLOZCORPUS