L’alimentation constitue la voie royale pour considérer les relations homme-écosystème, puisqu’elle consiste en l’incorporation d’éléments extraits de l’environnement (local ou mondialisé) et qu’elle constitue à la fois la fonction biologique première et la fonction sociale fondamentale. Elle met en jeu, de la production ou de la collecte des ressources jusqu’à leur transformation et à leur incorporation, des mécanismes psychologiques, sociaux, culturels, économiques réglant ou déterminant les relations entre les individus (organismes, citoyens, consommateurs), la société, la culture et les écosystèmes. L’alimentation, qui a été longtemps négligée par les sciences sociales, pose pourtant à la fois les questions les plus locales (paysages, productions locales, terroirs, identité) et les plus planétaires (sécurité alimentaire, relations internationales, santé publique), notamment celle de la simultanéité, dans le monde contemporain, d’une progression de l’obésité et d’une persistance de la faim (sur la planète, un nombre équivalent d’individus souffriraient de la faim et de l’obésité). A travers elle se posent aussi les questions politiques et économiques de la technique et de l’appropriation marchande du vivant ou celles de la perception du risque, toutes questions traitées et susceptibles d’être poursuivies au sein du IIAC.
Thème 1 : Anthropologie de la commensalité.
L’alimentation pose à la fois la question biologique la plus vitale et la question première de la socialité (coopération et compétition, solidarité et antagonismes, division des tâches et des ressources, hiérarchie et étiquette, etc) à travers cette catégorie anthropologique fondamentale : la commensalité.
Ce thème de recherche « commensalité » a été initié par Claude Fischler depuis 2011, fait l’objet d’un séminaire depuis 2011, de cinq thèses financées (dont deux au moins qui seront soutenues avant la fin de 2012). .
Le thème « anthropologie de l’alimentation » a fait l’objet de plusieurs ANR ou projets à des stades divers de réalisation ou de préparation. Les unes sont en voie d’achèvement mais en cours d’analyse et de publication. C’est le cas d’ALIMI — vaste enquête sur alimentation et migration dont les résultats constituent une base de données qui fera encore l’objet d’analyses en 2013 et probablement au-delà.
Qualirapa est un ANR du programme blanc, porté par Claude Fischler et mené sur le terrain par Christophe Serra-Mallol, ancien doctorant et aujourd’hui MCF à Toulouse Le Mirail. Ce projet est fondé sur la poursuite et l’intégration dans une problématique anthropologique et un programme ethnographique des travaux comparatifs menés précédemment sur « happiness and well-being » avec l’équipe interdisciplinaire dirigée à Princeton par Daniel Kahneman (prix Nobel d’économie 2002) avec Alan Krueger (chef du conseil des économistes de la Maison Blanche), Norbert Schwartz (University of Michigan) et Alan Stone (Stony Brook University). Les données concernant l’alimentation sont de deux types, ethnographiques d’une part, quantitatives d’autre part (à partir d’un questionnaire de type emploi du temps administré à l’ensemble de la population de l’île étudiée). Là encore les analyses et publications en cours se prolongeront jusqu’à la période du nouveau quinquennal.
ANAMIA (recherches sur les réseaux anorexie-boulimie en ligne et hors-ligne, en partant des sites web dits « pro-anorexie ou « pro-ana »), ne doit s’achever qu’à l’été 2013 et produit une base de données qualitatives et quantitatives qui fera l’objet d’analyses et de publications en 2014 et au-delà. ALIMI comme ANAMIA doivent donner lieu au montage de nouvelles ANR en 2013-2014. Dans la continuité d’ANAMIA, notamment, le projet pourrait proposer la cartographie complète des communautés de patients en ligne.
ALIMI : cette ANR a mobilisé et lié étroitement un réseau interdisciplinaire comprenant le laboratoire MOISA du CIRAD (Nicolas Bricas et al, Montpellier), le CETIA (JP Poulain et al, Toulouse Le Mirail), l’IRD (Bernard Maire, Montpellier) et des équipes au Maroc et au Mali. La base de données constituée est d’une richesse qui autorisera diverses publications et recherches supplémentaires, dont une probable ANR à venir mettant en jeu le même réseau.
Le projet EducAlim, mené sur trois ans en collaboration avec le LESMA (Audencia Nantes), avec des crédits des ministères de l’agriculture et de l’Education Nationale, doit suivre huit classes d’écoles primaires de la région Pays de Loire pendant trois ans et examiner le processus de socialisation alimentaire des enfants dans le contexte de la restauration scolaire. Ce projet est conduit au sein du IIAC par Claude Fischler et Ghislaine Richard, docteur en psychologie sociale, IATOS (EHESS).
Enfin un ambitieux projet European Research Council senior (MEALS), prévu sur cinq ans, est en cours d’évaluation. En août 2012, le projet a été retenu pour le second tour, qu’atteignent seulement 20% des projets soumis (C. Fischler).
Dans le cadre du bloc pédagogique que nous proposons par ailleurs nous mettons à l’étude un module « anthropologie de l’alimentation » de niveau Master 2, qui a fait l’objet de demandes répétées.
Chercheurs titulaires : Claude Fischler, Sergio Dalla Bernardina, Ghislaine Richard, Evelyne Ribert, Jocelyne Ohana ; associés : Jocelyn Raude, Christophe Serra-Mallol, Natacha Calandre, Saadi Lahlou.