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La patrimonialisation des espaces naturels et ruraux. Regards Croisés Mexique-France

publié le

Troisième séminaire du projet
Le territoire et ses constructions. Regards Croisés Mexique-France

Centre d’Études Transdisciplinaires. Sociologie, Anthropologie, Histoire (EHESS), Paris
Centre de Recherche Ville, Société, Territoire (UMR Citeres/CNRS-Université Tours)
Equipe Agua y Sociedad de El Colegio de San Luis (SEP-Conacyt-Mexique)

Les 28 et 29 juin 2006 à l’EHESS, 105 bd Raspail, Paris 6è

Programme

Financé par les programmes
ECOS/Nord-ANUIES/Conacyt (Action M03H04)
ACI –Terrains, Techniques, Théories
Travail interdisciplinaire en sciences humaines et sociales
Ministère délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies


L’objectif de ce séminaire réalisé dans le cadre du projet « Le territoire et ses constructions. Regards croisés Mexique-France » est d’interroger la pertinence de la notion de patrimonialisation pour analyser les mutations des perceptions, représentations et pratiques des espaces « naturels » et ruraux dans les contextes mexicains et français. Il s’agit en particulier de tenter de discuter le rôle des différentes formes de saisie patrimoniale de ces espaces dans les processus de territorialisation.

Les échanges réalisés dans le cadre de notre projet, ont permis de prendre conscience de l’ampleur des différences de contextes en ce qui concerne les modalités de ce que nous avions dénommé « crise de vocation » des espaces ruraux ; les formes de la diffusion de l’urbanisation mais aussi les cadres analytiques avec lesquels les sciences sociales prennent en compte les dynamique de ces espaces ruraux. Il n’en reste pas moins que dans les deux contextes semblent se multiplier les situations sociales qui contribuent à charger des espaces ruraux ou « naturels », des éléments du milieu, de valeurs patrimoniales. C’est-à-dire à la fois la reconnaissance de leur importance pour l’identité et l’existence d’un groupe, mais aussi une façon particulière de penser le devenir d’espaces et d’objets à partir de leur « conservation », et l’acceptation d’une responsabilité publique dans cette conservation pouvant déboucher sur l’encadrement des usages et de la propriété. Ces processus de patrimonialisation peuvent résulter de politiques publiques, de revendications des populations rurales ou des usagers.

Nous proposons pour organiser la discussion, plusieurs niveaux d’analyse des relations entre patrimonialisation et territoire :

– Le premier élément de cette thématique concerne la « construction de territoires » patrimoniaux et les acteurs impliqués dans cette fabrication. Dans un contexte de crise et de reconfiguration du rapport individu-nature et des formes d’exploitation et d’appropriation des ressources naturelles - qui se cristallisent dans la préoccupation environnementaliste - le patrimoine est à la fois construction sociale et construction territoriale dans le cadre de la production de territoires patrimoniaux (écomusées, « pays », PNR, aires naturels protégés, parc nationaux), et de l’émergence de nouvelles formes de patrimoine (rural, végétal, ethnologique).

– La patrimonialisation expriment-elle un processus par lequel des populations urbaines ont transformé les espaces ruraux en cadre de vie et en paysage ? S’agit-il d’un mode urbain de relation à la campagne-nature, terrains d’exercice de nouvelles pratiques, lieu d’investissement affectifs ou esthétiques, un mode d’appropriation symbolique d’un paysage élu devant être préservé de toutes formes de dégradation engendrés par l’activité anthropique ? Les demandes de patrimonialisation par des groupes locaux ont-elles pour seuls objectifs d’attirer des populations urbaines et une mise en tourisme de l’espace ?

– Quel est le rôle des qualifications juridiques sanctionnant la valeur patrimoniale d’un espace ? Quels que soient leurs effets juridiques, elles sont perçues comme mettant en œuvre une vigilance accrue. En identifiant des éléments du patrimoine commun, elles procèdent - paradoxalement - à une mise en visibilité des atteintes aux éléments quelles sont censées préserver. Indépendamment de leur effectivité, elles peuvent contribuer à la « naturalisation » de certains espaces, et constituer des ressources pour certains groupes.

– A l’opposé, la patrimonialisation peut-elle constituer une stratégie de réappropriation par un groupe local de ressources à gérer en commun. Des formes contemporaines d’action collective et la mobilisation de processus de planification communautaire peuvent introduire une nouvelle forme de relation à un espace commun et fondée sur une stratégie de patrimonialisation et de la mise en place de nouveaux modes de régulations locaux de l’usage des ressources naturelles.

– La patrimonialisation ne sanctionne pas seulement la relation entre un groupe local et son terroir, elle implique la présence d’un tiers, qui actualise ou dans certains cas produit une nouvelle forme de lien entre un groupe et un espace. Quel rôle jouent, dans ces processus, les experts et chercheurs qui identifient, qualifient et certifient des espaces à préserver, mais aussi des pratiques et des modes de production ? Dans la fabrication de ces territoires patrimoniaux, le rôle des experts et des mouvements associatifs est très important. Des territoires se construisent sous la double bannière de la « tradition » et du « local », mais cette « tradition » et ce « local » sont fortement réinterprétés et réinventés, la quête de racines étant d’ailleurs souvent le fait de néo-résidents installés depuis peu dans la localité ; ce sont ceux-là que, dans bien des cas, on trouve à la tête des mouvements associatifs. Ce processus s’accompagne, dans une interaction réciproque, de la création ou de l’invention d’identités locales qui en même temps produisent et défendent ce patrimoine, en fondant et en assurant leur existence.

– En élargissant le groupe patrimonial, les formes contemporaines de patrimonialisation proclament une valeur de bien de commun pour certains espaces, objets ou pratiques. La patrimonialisation est-elle une publicisation. Peut-on considérer que l’espace rural et naturel devient un nouvel espace public ?