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RÉINVENTIONS THÉORIQUES 1 - 1ère session : S’engager/Rester connecté

par Boillon - publié le

Jeudi 16 avril 2015 - Salle 015 - Marc Abélès, Lynda Dematteo
Axe politique de l’IIAC
Journées d’étude « 40e anniversaire de l’EHESS »
RdC, bât. Le France, 190-198 av de France 75013 Paris
RÉINVENTIONS PERMANENTES
Les anthropologues du politique aux prises avec leur temps

Deux journées d’étude mobiliseront des chercheurs de l’EHESS issus de différents centres, des chercheurs extérieurs et des collègues étrangers, connus pour leurs contributions scientifiques relatives aux mutations disciplinaires passées et présentes, pour évoquer le désir de renouvellement disciplinaire qui anime les anthropologues du politique depuis la fin des années 1960. Les jeunes anthropologues de cette génération voulaient « réinventer leur discipline » comme le formula Dell Hymes et ils y sont parvenus en bouleversant de manière irréversible le paysage anthropologique aussi bien par leurs productions que par leurs engagements. L’anthropologie politique est sans doute l’une des disciplines des sciences sociales qui a connu les redéfinitions épistémologiques les plus radicales depuis 40 ans. L’anniversaire de l’EHESS sera l’occasion de revenir sur les travaux qui s’inscrivent dans cet effort de réinvention. Les fondements scientifiques de la discipline ont volé en éclats. Les anthropologues occidentaux, bousculés par les travaux critiques émanant des études littéraires, ont redéfini leur rapport au terrain. Le paradigme de l’altérité a été remis en cause et la politique de l’anthropologie entièrement redéfinie. La pratique du terrain n’a aujourd’hui plus rien à voir avec ce qu’elle était dans l’immédiat après-guerre. Le développement d’anthropologies nouvelles, étrangères aux trois grandes « écoles » dont l’histoire se confondait avec celle du colonialisme (américain, britannique et français) nous a fait entrer dans une nouvelle phase. Les études postcoloniales ont décentré le regard des anthropologues européens.
Aujourd’hui, la globalisation place les anthropologues du politique devant de nouveau défis. Pourquoi doivent-ils se saisir de nouveaux objets, explorer de nouvelles stratégies ethnographiques et inventer de nouveaux agencements ? Les différentes structures de pouvoir s’avèrent plus difficile à saisir aujourd’hui que dans les années 1960, car les « lieux du politique » se sont déplacés. Cependant, l’anthropologie du politique est paradoxalement mieux armée pour aborder le contemporain, car elle est née en pensant un en-deçà de l’Etat et il lui faut à présent penser un au-delà de l’Etat. Le relatif déclin des Etats-nations et l’émergence du « global-politique », ces nouvelles configurations globales s’incarnant en partie dans des organisations internationales qui produisent et diffusent des concepts à l’échelle planétaire, focalisent aujourd’hui son attention, tout comme les réactions que les processus de globalisation génèrent en retour. L’anthropologie a longtemps privilégié le lointain et les marges des sociétés occidentales en considérant, dans une perspective foucaldienne, les manières dont le pouvoir s’imprime sur les corps. Ces deux approches ne sont pas contradictoires, elles sont bien plutôt complémentaires. Le pouvoir suscite immanquablement des résistances de la part de ceux qui cherchent à s’y soustraire, voire à s’y affronter. L’anthropologue, sur ses terrains, est depuis toujours pris dans ces rapports de forces opposées qu’il s’efforce de décrypter et parfois même de déplacer.
Quel rôle les anthropologues de l’EHESS auront-ils joué dans cette vaste entreprise de repositionnement scientifique ? Dans quelle mesure les échanges avec les collègues des autres continents ont-ils nourri la réflexion critique ? De quelles manières le dialogue interdisciplinaire a-t-il contribué à ce vaste travail de redéfinition disciplinaire ? Comment les anthropologues du politique, en prise avec leur temps et ses incertitudes, s’efforcent-ils de réinventer leur travail de chercheur et l’anthropologie elle-même ? Comment se frayent-ils des voies de traverses pour mieux saisir le politique dans ses manifestations les plus contemporaines ?

Programme :