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Nawel, Aït Ali

publié le

Nawel Aït Ali
Doctorante en Sociologie
Dir. de thèse : Jean-Bernard Ouédraogo
LAIOS-IIAC, EHESS, Paris

aitali.nawel@gmail.com

Lien annexe et CV sur https://ehess.academia.edu/NawelAïtAli

Sujet de recherche : Une aventure française des Postcolonial studies : la (per)formation des identités politiques du savoir académique.

Les histoires coloniale et postcoloniale françaises bénéficient aujourd’hui d’une relative visibilité scientifique. Ainsi en témoigne un ensemble foisonnant de travaux parmi lesquels ceux de Ann Laura Stoler (sur l’articulation des questions sexuelles et raciales dans les régimes coloniaux), de Benjamin Stora (sur l’empire colonial français et la guerre d’Algérie) d’Emmanuelle Saada (sur l’articulation du droit et de la violence dans l’empire colonial français), d’Emmanuel Blanchard (sur le maintien de l’ordre en situation coloniale) ou encore de Elsa Dorlin (sur la généalogie sexuelle et coloniale de la Nation française). Tout aussi nombreux sont les travaux qui examinent les politiques publiques infléchies par le modèle d’intégration républicain et ses soubassements idéologiques universalistes (Rigouste, Blanchard, Guénif, Bouamama) ou la fabrique des subjectivités politiques "postcoloniales" (Hajjat, 2008, Munif, 2011). Plus réduits sont ceux qui analysent les ressorts de l’expérience minoritaire en contexte français et engagent une réflexion documentée empiriquement sur la dimension ethno-raciale des inégalités scolaires et universitaires qui travaillent les destins socio-professionnels des populations d’ascendance migrante dite ex-coloniale (Mabillon-Bonfils 2016, Beauchemin, Hamel et Simon 2015).

Cette enquête de thèse s’élabore plus spécifiquement en dialogue avec un "moment postcolonial" envisagé comme fondateur dans le débat public et académique (Bennington 2016, Zecchini and Lorre 2010, Cohen et al. 2007). Un premier temps exploratoire a consisté à prendre ce "moment" au sérieux et à en identifier les incidences aujourd’hui (2014-17) dans les pratiques instituées de production de savoir en sciences sociales et du côté des lettres. Plusieurs mois d’enquête sur le sujet conduisent ainsi à former le constat d’une grande diversité épistémique parmi les usager-e-s en France des Postcolonial studies et d’un ensemble de paradigmes en interaction dont il s’est agi de caractériser et de cartographier les affiliations.
Un dénominateur commun se dégage néanmoins ici : la critique explicite d’un ensemble d’allant-de-soi qui caractériseraient la doxa qualifiée de "mainstream". Ainsi en est-il, de façon non exhaustive, des ethno-centrismes qui persisteraient à structurer la formalisation des objets de recherche, les postures d’enquête, le rapport au terrain, l’articulation de l’empirie et de l’élaboration théorique, ou encore de la spécialisation disciplinaire qui organise le champ académique français.
Ce premier temps de l’enquête donne par ailleurs à voir un contraste significatif entre les trajectoires et les récits d’expérience des usager-e-s français ou étranger-e-s d’ascendance euro-nordaméricaine et leurs pairs français-e-s ou étranger-e-s d’ascendances différentes, qui augmente encore lorsque les objets d’enquête sont localisés dans un périmètre francophone. Ce second groupe, pourtant assez hétérogène dans ses caractéristiques sociologiques et ses pratiques scientifiques, se heurte à une double injonction régulièrement reconduite dans leurs trajectoires : celle de se conformer aux canons disciplinaires d’une part, de désamorcer une lacune de "scientificité" et de "distance" assertée vis-à-vis des objets d’enquête, de l’autre.

Dans un second temps de l’enquête, il s’est agi de s’écarter de l’environnement strictement académique des individu-e-s pour saisir la fabrique des catégories de connaissance qu’elles et ils affûtent et partant, de se familiariser à d’autres espaces-temps qui participent de la formation et de l’expression de ces catégories : des espaces militants et/ou des espaces artistiques plus ou moins accessibles au public et institués, mais aussi des espaces plus confidentiels, voire des espaces domestiques.
Ce second moment exploratoire permet d’informer les mobiles, les tensions et les contradictions qui animent les individu-e-s engagé-e-s dans de telles pratiques d’expression de connaissance. Il entend entretenir une réflexion en dialogue étroit avec un ensemble de postulats fondateurs dans les travaux sur la production de savoirs académiques et l’articulation du savant et du politique, de Max Weber (1917, 1919) à Donna Haraway (1988). Il entend de surcroit explorer à nouveaux frais ce que Du Bois thématise comme un phénomène de "double conscience" (1903).
Partant de là, ce volet empirique de l’enquête ouvre le champ à une exploration plus incisive des ressorts quotidiens de l’action et de l’expérience sociale des individu-e-s enquêté-e-s (Dubet, 2007). Et au-delà du giron socio-professionnel de la connaissance instituée, il autorise une réflexion plus générale sur les subjectivités politiques au travail en contexte dit multiculturel et globalisé.

Domaines de recherche :

• Sociologie des sciences et des professions académiques
• Sociologie politique du fait minoritaire

- Mots-clés : sociologie de la connaissance, des sciences et des professions académiques, anthropologie de la perception, sociologie du fait minoritaire, histoire des idées, processus de subjectivation politique.