Le 11 février 2019, l’Iran commémorera le 40e anniversaire de la révolution. Une révolution très tôt stigmatisée comme islamique tant Khomeiny et le clergé chiite semblaient avoir contrôlé l’ensemble d’un processus qui a abouti à l’instauration de la République islamique et à l’institutionnalisation des règles de la charia. L’enjeu consiste donc à démontrer que contrairement aux idées et discours prédominants, la Révolution iranienne n’était dans sa genèse ni islamique, ni religieuse et encore moins khomeiniste. Cette révolution, comme toutes les révolutions, fut l’œuvre d’un ensemble complexe, composé d’acteurs et d’idées antagoniques. Elle a découlé d’un processus lent qui a gagné en épaisseur au fur et à mesure que les vagues de protestation montaient et regroupaient des fractions toujours plus importantes du corps social. Seulement, le clergé chiite, sous l’égide de Khomeiny, a su mieux capter l’élan du mouvement protestataire que les groupes sociaux et les formations politiques concurrents, qu’ils soient laïcs musulmans, démocrates ou d’extrême gauche, communistes ou non communistes dans un vaste éventail de maoïstes, trotskistes, staliniens, libertaires.
Il s’agit pour nous de revenir sur les années révolutionnaires en nous intéressant aux symptômes culturels et sociétaux d’une insistance politique. L’aspiration à la liberté face à la tyrannie et au risque de guerre civile qui ont présidé à la Révolution iranienne de 1979 demeure malgré sa confiscation par Khomeiny. C’est dans les institutions civiles, leurs traductions démographiques, la vie intellectuelle et politique que nous puiserons les traces et les arguments de cette insistance. Cette insistance témoigne d’un certain courage, conscient ou inconscient, qui pourrait s’épuiser et signerait par épuisement seulement maintenant, la victoire annoncée de longue date d’une oppression orchestrée par un Guide suprême sous couvert d’un président supposé modéré.