Nous voici, à quelques semaines de la Conférence mondiale Rio +20, une fois de plus confrontés au grand paradoxe : autant la gouvernance onusienne – celle des phénomènes planétaires – est une réalité, autant l’unité d’une gouvernance mondiale est une utopie. On ne voit aucune possibilité concrète pour que l’ONU devienne une instance mondiale dotée d’une capacité de planification capable de mettre sur la voie une autre conception du développement (au-delà du développement), visant à satisfaire équitablement les besoins relatifs à des milliers d’êtres humains et à respecter l’environnement des générations présentes et futures.
Aujourd’hui nous ne pouvons pas, ou nous ne savons pas, affronter les dangers d’une utilisation inconsidérée des technologies et d’une course frénétique à la consommation, ni traiter les conséquences de ces dangers qui menacent la survie de l’humanité.
Or un système qui ne peut affronter les problèmes auxquels il doit faire face est menacé de désintégration. Le défi est alors d’amorcer une véritable métamorphose vers un système plus riche, plus complexe, capable de mieux traiter ces problèmes.
Nos sociétés sont engagées dans un mouvement de globalisation. Nous pensons que nous sommes en mesure de penser une « société-monde » plus juste, plus équitable, plus solidaire, plus respectueuse de notre planète. Le mode de développement actuel doit être repensé dans la perspective d’une politique de civilisation et d’une politique pour le bien et la survie de l’humanité. Certains en viennent à penser que nous allons vers un état de chaos et évoquent « l’agonie » de notre planète et de nos systèmes socio-économiques, mais nous savons aussi que le mot « agonie » signifie lutte suprême entre les forces de la mort et les forces de la vie et que, paradoxalement, ce qui peut apporter la mort, peut apporter la vie.
QUE FAIRE ? Nous sommes désormais confrontés à un véritable dilemme, conséquence de politiques de laisser-faire et du tout économique. Tout ceci repose sur une croyance erronée : le mode de développement actuel peut se perpétuer et la Terre demeurera à peu près en état, au moins durant encore quelques décennies. Enfermée dans cette logique de pensée, l’humanité pourrait se retrouver bientôt prise au dépourvu et confrontée à la plus redoutable épreuve de son histoire. L’accélération du changement climatique en cours va balayer l’environnement confortable auquel nous sommes adaptés.
Nous sommes convaincus que nous devons dépasser l’idolâtrie de la croissance. Pour mieux affronter les problèmes concrets de nos sociétés qui sont par essence multidimensionnels, il est nécessaire de sortir du cloisonnement disciplinaire auquel nous avons été condamnés dès les premiers pas de l’école élémentaire. La science ne peut ni ne doit être une collection de disciplines cloisonnées. Elle doit, pour garder un sens, être partagée avec tous, tant dans ses orientations que dans ses résultats.
Il n’est plus possible de continuer sur la même voie, ni d’aménager les orientations actuelles avec quelques « béquilles ». Nous devons œuvrer pour nous assurer que les lois et réglementations soutiennent réellement un développement qui s’inscrit dans le temps, plutôt que la croissance économique.
Nous voici maintenant à la croisée des chemins. Deux routes s’offrent à nous, mais elles ne sont pas également belles. Celle qui prolonge la voie que nous avons déjà trop longtemps suivie est trompeusement dangereuse ; c’est une voie où toutes les vitesses sont permises, mais qui mène droit au désastre. L’autre, nullement promise à la victoire, nous offre – qui sait – notre dernière et unique chance d’atteindre une destination qui garantira la préservation de notre Terre-Patrie.
Nous avons constitué depuis 2010 au sein de l’IIRPC un groupe de réflexion international pour porter une contribution originale lors de « Rio plus 20 ». Un des objectifs est l’élaboration d’un cadre de questionnement, après une démarche collective, questions prises dans leurs dimensions complexes, essentiellement planétaires, et délibérément soucieuse de mettre l’être humain au cœur d’un projet politique global, présidé par Edgar Morin, poursuit son important travail de réflexion et de propositions.
Avec le soutien du sénateur de la république du Brésil Cristovam Buarque, vice-président de l’Institut et actuel président de la commission du sénat brésilien pour les préparatifs de Rio+20 et en partenariat avec Marina Silva, ancienne ministre de l’environnement du gouvernement de Lula, directrice de l’« Institut Démocratie Soutenable » et l’Université de Brasilia, nous avons l’opportunité d’avoir une Tribune Internationale au prochain sommet de Rio, les 17, 18 et 19 juin, afin d’y délivrer notre vision, quelles qu’en soient les formulations, ils ont traits aux défis d’une politique de l’humanité, notamment dans le rôle des territoires face aux enjeux concernant l’agriculture, la sécurité alimentaire et environnementale dans le monde.
C’est une occasion exceptionnelle de faire entendre un autre discours sur les performances agricoles et alimentaires de ce qu’on appelle parfois avec condescendance « les agricultures vivrières et paysannes », sur le concept de ville durable, la place des Territoires dans les enjeux du changement climatique, etc. Nous serions très heureux que vous acceptiez de participer aux activités envisagées et de faire partie de la délégation que nous sommes en train de constituer avec des acteurs de terrain et des personnalités du monde universitaire.
Il s’agit de démontrer, aux acteurs de la sphère politique et à un certain nombre d’organisations présentes, la pertinence de nos idées dans la réponse à une série de défis, celui que pose le changement climatique, celui de la pollution et des désordres sanitaires, de l’emploi et de la dignité humaine, celui des équilibres économiques et sociaux, et enfin le grand défi pour la paix dans le monde.
Nous porterons un regard particulier aux actions menées au sein des territoires. Nous constatons qu’aujourd’hui les Territoires sont contraints d’élaborer des politiques publiques environnementales, étant donné que dans certains cas, on assiste à une concentration des problèmes ayant un lien direct ou indirect avec l’accroissement de l’intensité ou de la fréquence de certains aléas climatiques. Ce dernier aspect constitue donc un enjeu important pour l’avenir des Territoires.
Programme d’action 2012
Pour la première fois des Territoires pourront présenter leur engagement sur le plan écologique, social, économique, urbanistique, éducationnel dans un regard croisé entre expériences des pays du nord comme du sud. Nous montrons à l’échelle locale les initiatives des collectivités résolument orientées vers la sauvegarde de la planète pour les générations présentes et futures, cinq axes essentiels :
• la transition écologique ;
• l’approche agro-écologique ;
• la conception de cités pérennes ;
• la construction d’une nouvelle économie critique ;
• l’éducation pour éveiller une conscience planétaire.
Agenda :
Identification des Territoires engagés sur des champs d’action du développement durable (deux en France, deux en Amérique latine et un en Afrique) ;
Constitution d’un partenariat avec des acteurs institutionnels (collectivités, villes, Universités, centres de recherche, Fondations) et des organisations non gouvernementales.
Identifier les institutions susceptibles de contribuer au financement de cette entreprise. Le budget servira à la prise en charge des frais de voyage et de séjour des personnalités invitées ainsi qu’à la préparation des activités scientifiques que nous proposons.